16 octobre 2009

René Char : la science, un phare aveugle

En mai 1968, à l'écart des événements qui secoue la France, René Char fait une crise cardiaque, première d'une longue série d'accidents cardiovasculaires. Il évoque cette "expérience" dans le texte liminaire du Chien du Cœur, publié un an après "Je crus que la mort venait, mais une mort où, comblé par une compréhension sans exemple, j'aurais encore un pas à faire avant de m'endormir, d'être rendu éparpillé à l'univers pour toujours." Ce recueil, illustré d'une lithographie originale de Joan Miro pour les 95 premiers exemplaires, donne à lire six poèmes dont "Les Apparitions dédaignées", texte qui dénonce les absurdes distorsions de la société moderne. Le poète discrédite l'utilité de la science qui assoit un peu plus le divorce entre l'homme et la nature :

"Les civilisations sont des graisses.
L'Histoire échoue, Dieu faute de Dieu
n'enjambe plus nos murs soupçonneux,
l'homme feule à l'oreille de l'homme,
le Temps se fourvoie, la fission est
en cours. Quoi encore?

La science ne peut fournir à l'homme
dévasté qu'un phare aveugle, une arme
de détresse, des outils sans légende. Au
plus dément : le sifflet des manœuvres."
extrait de "Les Apparitions dédaignées" in Le Chien de coeur.

Actuellement, la librairie Loliée propose :
  • Char (René). Le Chien de cœur. Paris, G.L.M., 1969, in-8, broché. Édition originale. Un des 95 premiers exemplaires sur vélin d’Arches comportant une lithographie originale en couleurs signée de Joan Miro. (Seuls ces exemplaires contiennent la lithographie).